Notes : Auteur prolixe, Poppy Z. Brite, née en 1067 à La Nouvelle-Orléans s'est faite remarquée à 18 ans pour ses romans d'horreur. Avec Alcool, nous recevons en pleine bouche le premier volet d'une trilogie épique (c'est le moins qu'on puisse dire) et gastronomique. – Ça commence à prendre forme, dit Carlos sans lever les yeux. L'enseigne n'était pas des plus subtile mais Rickey n'avait pas l'intention qu'elle le soit. Le mot Alcool se déployait sur environ trois mètres dans une typographie cursive bien lisible malgré ses grandes boucles. Une fois alimentés par le gaz, les lettrages seraient roses. L'empâtement du L final se prolongeait en une verre de Martini bleu dans lequel flottait une olive verte. Rickey avait griffonné ce logo sur une serviette en papier à l'Apostle Bar, mais n'avait jamais avoué à personne à quel point il le trouvait beau, pas même à G-Man. Très voyant, il frisait le mauvais goût. Rickey s'en rendait bien compte ; mais en même temps, il avait une sorte de classe rétro qui lui rappelait La Nouvelle-Orléans de sa petite enfance. Alcool est un peu à l'image de l'enseigne du restaurant éponyme, dans un style néogangstarisant sympathique et un peu sale. En suivant les aventures de Rickey et de G-Man, meilleurs amis puis meilleurs amants, toute une palette de sensations s'offre à nous. Même si on a affaire ici plus à une littérature pour glouton qu'à une littérature de fin gourmet, la générosité des phrases (toutes ruisselantes de savoureuses trouvailles en incise) et les talents narratifs du chef sauront en émouvoir plus d'un. Car c'est toujours avec jubilation et fraternité que Poppy Z. Brite sait décrire les marges et les combines. Si Alcool trouve son principal intérêt dans les nombreuses descriptions alléchantes qui sont faites de la cuisine et de ses coulisses, c'est aussi une forme de déclaration d'amour à La Nouvelle-Orléans et à ses génies. Elle dédicace d'ailleurs ce roman à John Kennedy Toole qui y est né et a choisi d'y mourir.